La confusion des rôles? : Médecine et évaluation des contraintes à l’emploi

Les inégalités sociales de santé représentent une problématique, malheureusement d’actualité, qui commence à peine à attirer l’attention. Les professionnels de la santé de la première ligne sont appelés à œuvrer auprès de populations parfois très démunies, discriminées et même stigmatisées. Les médecins de famille semblent jouer un rôle important dans la trajectoire de vie de plusieurs de leurs patients et ce, à différents niveaux. Si l’on considère le domaine professionnel, on se rend rapidement compte que le médecin traitant est en mesure d’influencer profondément le parcours de certains patients. Entre autres, c’est à lui que revient la décision d’accorder un certificat d’invalidité au travail qui permettra éventuellement de fournir un revenu de remplacement ou une prestation supplémentaire d’aide sociale dans certains cas.

De prime abord, ce « pouvoir » que détient l’omnipraticien peut sembler en contradiction avec son rôle de soignant et l’approche centrée sur le patient tant promulguée dans les facultés de médecine. Que nous dit la littérature scientifique à propos de la perception qu’ont les médecins généralistes de leur rôle dans l’évaluation des contraintes à l’emploi ?

Les thèmes abordés dans les écrits sont regroupés afin de répondre à trois ensembles de questions. D’abord, je tenterai d’établir les conséquences pour les médecins eux-mêmes, dans le fait d’assumer la responsabilité de l’évaluation des contraintes à l’emploi. Ces conséquences prennent la forme de perceptions, d’attitudes et de comportements, à leur tour influencés par l’expérience et la pratique des médecins. Par la suite, j’explorerai comment le rôle joué par les médecins dans l’émission de certificats, peut affecter la relation thérapeutique avec le patient. La tâche d’évaluation semble complexifier les interactions avec ce dernier et multiplier les chapeaux portés par le médecin traitant. Finalement, je tenterai de cerner le cas des rapports entre les médecins et l’administration des rentes d’invalidité, en sachant que ces rapports peuvent avoir de grandes répercussions sur les populations sujettes à l’appauvrissement. La position adoptée par le corps médical peut, soit les stigmatiser davantage, soit leur apporter un réel soutien.

Les conséquences d’une tâche complexe pour le médecin évaluateur

Comment les médecins perçoivent-ils cette responsabilité ? Comment cette tâche se traduit-elle dans les comportements des médecins ?

Les perceptions et la compréhension de la tâche d’évaluation

De façon générale, l’évaluation de l’invalidité à l’emploi est une tâche perçue de façon négative par les médecins généralistes. Les praticiens britanniques la décrivent comme étant un fardeau, une corvée et même une plaie (Hiscock et al., 2005). Aux États-Unis, les médecins généralistes considèrent cette tâche comme étant la plus inconfortable, comparativement, entre autres, à la prescription de narcotiques, à l’enseignement et à la discussion sur la fin de vie avec un patient (O’Fallon et Hillson, 2005). D’autres se disent plus ou moins confiants par rapport à leur capacité de déterminer la présence d’invalidité chez un patient (Zinn et Furutani, 1996). Des médecins finlandais ont exprimé beaucoup de frustrations en lien avec l’acte de remplir un formulaire d’évaluation d’invalidité, particulièrement lorsque les considérations non médicales sont nombreuses (Lien, 1992). Certains médecins voient cette responsabilité d’évaluation comme faisant partie des soins à prodiguer aux patients en âge de travailler, alors que d’autres souhaiteraient l’exclure de la prise en charge globale (Sawney, 2002).

En raison d’un manque de connaissances en matière de santé occupationnelle, les médecins généralistes échouent parfois à reconnaître des situations qui nécessitent un arrêt de travail. Ils possèdent rarement toute l’information pertinente relative à l’emploi et au lieu de travail du patient et ne sont pas suffisamment outillés pour évaluer sa capacité fonctionnelle et occupationnelle (Sawney, 2002). De plus, ils semblent avoir des connaissances insuffisantes à propos de leur système national de certification d’invalidité. Bon nombre d’entre eux n’ont suivi aucune formation en lien avec ce système, que ce soit avant ou après leur graduation, et ils sont peu intéressés à le faire. Cela peut induire une incompréhension de leur rôle d’évaluateur et d’émetteur de certificat (Hussey, Hoddinott, Wilson, Dowell et Barbour, 2004; O’Fallon et Hillson, 2005; Romaniuk, 1995; Sawney, 2002; Walhström et Alexanderson, 2004).

Certains médecins éprouvent le sentiment d’être utilisés par le système et sont choqués de voir leurs décisions amoindries par leurs collègues œuvrant à l’hôpital (n’émettant pas de certificats) et par les instances de services et de soins de santé (Hussey et al., 2004). Un groupe de médecins généralistes allemands, interrogés sur les difficultés rencontrées en tant que « spécialistes » du système d’assurance-santé, ont soulevé l’important défi que posait la nécessité de réconcilier le diagnostic clinique, la demande et les attentes du patient ainsi que les critères législatifs (Nuchtern, 1993). On constate donc que cette position d’évaluateur est loin de faire l’unanimité au sein du corps médical et que les médecins ont une attitude plutôt défavorable envers ce rôle qui leur est bien souvent imposé par le système de santé et plus ou moins directement par l’État (Claussen, 1996; Sawney, 2002; Sutton, 1996).

Les attitudes et les comportements des médecins envers le système

En plus de mal comprendre le système de certification d’invalidité, il semblerait que les médecins n’en fassent pas toujours l’usage prescrit par le système de santé et des services sociaux, mais en détournent, d’une certaine manière, l’usage. La modification délibérée des informations concernant le patient dans le but d’obtenir un verdict d’invalidité est monnaie courante. Dans une étude réalisée au Massachusetts en 1996, 31% des médecins généralistes et internistes interrogés ont répondu avoir déjà exagéré les signes et symptômes cliniques d’un patient afin de s’assurer que celui-ci ait droit à la prime pour invalidité. Jusqu’à 39% d’entre eux approuvaient ce comportement (Zinn et Furutani, 1996). Cette situation illustre bien le dilemme provoqué par la confrontation du principe de bienfaisance envers le patient et du devoir d’honnêteté envers le système pour le médecin (Hiscock et al., 2005; Zinn et Furutani, 1996). Afin de s’en sortir, certains praticiens évitent de poser un diagnostic clair dans le but de maximiser les chances de leurs patients, sans toutefois tomber dans le mensonge (Hussey et al., 2004). Enfin, les médecins éprouvent de la difficulté à conseiller leurs patients sur des activités alternatives à leur emploi. Ils ont souvent peu d’attentes face au retour à l’emploi de leurs patients et ont donc un préjugé défavorable dès le départ (Sawney, 2002). Tout cela peut influencer négativement le pronostic de retour au travail.

Les facteurs liés à la pratique et à l’expérience des médecins

En plus de la perception négative, de la méconnaissance et de l’utilisation « délinquante » du système d’évaluation d’invalidité, d’autres facteurs tels que l’expérience et le type d’horaire de travail du médecin influençaient le taux d’émission de certificats d’invalidité. Il semblerait que les médecins bénéficiant d’une plus longue expérience aient tendance à délivrer davantage de certificats. Deux autres études ont souligné l’influence de l’expérience dans le processus d’évaluation d’une invalidité : les médecins plus jeunes semblent plus restrictifs et émettent moins de certificats (Getz et Westin, 1995; O’Fallon et Hillson, 2005). On peut donc se questionner sur les motivations qui peuvent entraîner un médecin plus âgé à remplir un certificat d’invalidité.

À l’heure actuelle, on ne peut qu’émettre des hypothèses sur le lien unissant l’âge, l’expérience et le taux d’émission de certificats. Certains auteurs y voient un effet « grand-père », c’est-à-dire que les médecins plus âgés seraient plus empathiques et feraient davantage confiance à leurs patients. Ces derniers seraient dès lors plus enclins à leur soumettre une demande d’évaluation d’inaptitude au travail (Reiso et al., 2000). Se pourrait-il aussi que ces médecins plus expérimentés possèdent une connaissance plus approfondie du système et des ressources et aient la plume plus légère sur les formulaires ?

Pour les médecins généralistes, assumer la responsabilité d’émettre des certificats d’invalidité représente un fardeau. Certains comprennent mal leur rôle et connaissent peu le système. Bien souvent, ils ne sont pas suffisamment outillés pour compléter une évaluation des capacités fonctionnelles et occupationnelles de leurs patients, étant donné que cela inclut des considérations non médicales. La frustration les entraîne même à modifier certaines informations et à avoir peu d’attentes face à la réintégration du patient sur le marché du travail. On constate également un certain effet de l’expérience et de l’âge des médecins au niveau de la quantité de certificats délivrés. Ce rôle d’émetteur n’a toutefois pas uniquement des conséquences pour le médecin. Le couple médecin-patient semblerait ne pas être à l’abri. Dans quelle mesure la relation de soin elle-même est-t-elle affectée ?

La relation thérapeutique et l’impact du certificat d’invalidité

Le conflit de rôles

Les facultés de médecine canadiennes enseignent une approche centrée sur le patient à leurs étudiants. Cette approche incite le médecin à considérer son patient comme une personne à part entière, dotée de jugement et habitée par un système de valeurs et de croyances qui lui est propre. La relation doit être égalitaire et empreinte de confiance mutuelle; le médecin doit agir en tant qu’expert médical auprès de son patient (Collège des médecins du Québec, 2001; Frank, 2007). Dans ce contexte, on peut concevoir le médecin comme étant un protecteur de la santé et du bien-être du patient. Comment vient alors s’inscrire ce rôle d’émetteur de certificats d’invalidité dans la relation médecin-patient ? De la même façon qu’ils considèrent ce rôle comme étant une corvée, les médecins le jugent en conflit d’intérêt majeur avec la relation privilégiée qu’ils entretiennent avec leurs patients. Ils se retrouvent à assumer une double fonction contradictoire : défenseur de ses patients et gardien d’un programme de l’État, ce qui soulève le débat éthique de la responsabilité du médecin (Getz, Westin et Paulsen, 1994; Hiscock et al., 2005; Sawney, 2002). Auprès de qui doit-il engager cette responsabilité ? Auprès du patient ou de la société civile ? La plupart des médecins s’accorderont pour dire qu’ils doivent d’abord représenter les intérêts de leurs patients (Hiscock et al., 2005; Hussey et al., 2004; Walhström et Alexanderson, 2004; Zinn et Furutani, 1996). Puisqu’ils voient une source potentielle de conflits dans le fait d’évaluer l’invalidité, ils pourraient interpréter certains critères d’admissibilité en faveur d’un patient et tenter ainsi de conserver une bonne relation thérapeutique (ce qu’ils font volontiers, comme nous l’avons vu précédemment). La démarche évaluative se viderait dès lors de toute impartialité. Ce qui peut nous amener à nous questionner sur la valeur médicale de tels certificats. D’autant plus que ces évaluations sont plus souvent fonctionnelles que strictement médicales (Toon, 1992). À l’opposé, son engagement auprès du patient et la volonté de lui apporter un bénéfice doivent-ils surpasser à tout prix l’honnêteté et l’exactitude de l’évaluation ? Puisque la compassion et la subjectivité semblent être inhérentes au processus de certification, on se retrouve donc devant ce que l’on pourrait qualifier de flou déontologique (Hussey et al., 2004). Le jugement médical paraît demeurer le seul outil permettant de s’en sortir.

La confusion des rôles

Mis à part le fait d’être conflictuel, ce rôle d’émetteur de certificats semble aussi être confus. Il n’est pas toujours clairement spécifié sur les formulaires si l’on demande au médecin de faire une simple évaluation de la situation ou de se compromettre et d’émettre un jugement quant à l’état du patient. Par exemple, sur le formulaire de la Régie des rentes du Québec, on demande au médecin d’inscrire un maximum d’informations et d’indiquer s’il croit que le patient pourra éventuellement reprendre son travail ou débuter un autre emploi. En même temps, on spécifie que ce sera le médecin évaluateur de la Régie qui jugera de l’éligibilité du patient (Régie des rentes du Québec, 2008). Il n’est donc pas clair si le médecin traitant doit agir à titre d’évaluateur en rapportant les faits ou porter un jugement. Le malaise peut être amplifié lorsque plusieurs partis sont impliqués, tels que le patient, l’employeur et l’État (Toon, 1992).

La responsabilité de santé : individuelle ou collective ?

La double fonction rattachée au rôle d’évaluateur, celle de défenseur du patient et de gardien de l’État, soulève un autre débat : celui de la responsabilité de santé. Il apparaît approprié de se questionner sur la part de responsabilité que doit assumer chaque personne envers son état de santé. Certes, chaque patient prend des décisions et fait des choix qui lui sont propres et qui peuvent influer sa condition. Par contre, les connaissances et la capacité de faire des choix (ce que l’on pourrait définir comme une liberté positive) ne sont pas les mêmes pour tous et toutes. Pour faire le bon choix, les bonnes options doivent être disponibles. Van De Vathorst et Alvarez-Dardet (2000) le soulignent dans leur article : la gamme d’options disponibles pour une personne est façonnée par ses environnements physique, économique, culturel et social. Une équipe de chercheurs hollandais est arrivée à la conclusion que les facteurs structuraux, c’est-à-dire, liés à l’environnement d’un individu, avaient un impact plus grand dans la création et l’aggravation des inégalités de santé, que les facteurs liés au comportement personnel (Stronks, Dike van de Mheen, Looman et Mackenbach, 1996). Dans le même ordre d’idées, Nessa (1996) affirme que le fait d’être malade peut mener à l’exclusion de la communauté, avec un risque réel de se voir perdre ses droits et devoirs, pourtant essentiels à chacun pour exercer sa citoyenneté.

La maximisation du revenu peut apparaître comme un outil efficace pour l’omnipraticien afin de promouvoir la santé de ses patients plus vulnérables (Harding, Sherr, Singh, Sherr et Moorhead, 2002). Par ailleurs, des médecins de famille anglais ont dit se sentir inconfortables à l’idée de priver certains patients d’un montant supplémentaire d’argent que le certificat d’invalidité pourrait leur apporter (Hiscock et al., 2005). Le problème est d’autant plus aigu à l’heure actuelle, que la pratique médicale est basée impérativement sur la preuve, que la recherche ne cesse de mettre au jour de nouveaux facteurs de risque pour les maladies chroniques et que la prévention primaire met l’accent sur les modifications des habitudes de vie personnelles. Peut-on envisager que le médecin considère réellement la condition socio-économique de ses patients dans leur prise en charge ? Malheureusement, il semblerait que ce ne soit pas fait systématiquement (Gulbrandsen, Fugelli et Hjortdahl, 1998).

Le rôle de malade du patient inapte à l’emploi

À partir du moment où le médecin appose sa signature sur un certificat d’invalidité, il approuve implicitement le rôle de malade du patient. Cette approbation est nécessaire, car le patient qui se voit incapable de travailler pour une raison médicale doit bénéficier de support. En contrepartie, il doit reconnaître son obligation de maximiser ses chances de retourner sur le marché du travail en guérissant ou en réduisant ses incapacités. Il ne peut se complaire dans son inaptitude. Le défi pour le clinicien, est d’empêcher cette descente vers la chronicité de l’invalidité et il doit donc apprendre à « gérer » la maladie du patient (Sawney, 2002).

L’évaluation de l’inaptitude à l’emploi semble multiplier les rôles et les interactions au sein de la relation médecin-patient. De simple soignant, le médecin se transforme en évaluateur ou en juge selon la situation. Il doit à la fois veiller sur ses patients, se faire le gardien d’un programme étatique et apprendre à incorporer la responsabilité du patient envers sa santé ainsi que son rôle de malade dans sa démarche d’évaluation. Ces rôles conflictuels et même confus rendent questionnable la valeur médicale du certificat d’invalidité et compliquent la relation thérapeutique. Qu’en est-il de l’interaction du médecin avec le gouvernement, unique administrateur des rentes d’invalidité et du système de santé au Québec ?

Le médecin comme interface entre l’individu et la société : quelles conséquences pour les patients ?

J’ai souligné précédemment le fait que la communauté médicale, en charge de l’évaluation de l’incapacité au travail, entrevoyait ce rôle comme étant conflictuel. En effet, ce double rôle apparaît comme contradictoire lorsque l’on demande au médecin d’agir à la fois comme défenseur des intérêts de ses patients (tel que le prescrit le serment d’Hippocrate) et comme gardien d’un programme étatique. Tel que mentionné, nombreux sont les médecins qui jugent que leur responsabilité envers leurs patients est plus importante que celle envers le portefeuille du gouvernement. Puisque la relation thérapeutique constitue l’un des éléments fondamentaux de la pratique médicale, certains médecins vont préférer déléguer toute responsabilité décisionnelle à l’État et éviter ainsi un conflit avec un patient (Hiscock et al., 2005). D’autres, vont préférer jouer un rôle plus désengagé et agir à titre de consultant en demeurant le plus neutre et objectif possible (Hussey et al., 2004). Claussen (1996) a même démontré que les médecins acceptaient leur rôle de gardien de l’État. Suite à la réforme norvégienne, ces derniers ont continué de proposer le même nombre de refus à l’allocation pour invalidité, malgré le fait que les patients éligibles souffraient probablement d’incapacités plus sévères. La divergence des pratiques et la complexité des rapports entre les médecins et les gouvernements ne sont pas sans impact pour les patients.

La complexité des relations entre les différents partis peut conduire à transformer le patient en objet de la transaction d’évaluation entre le médecin-évaluateur et le gouvernement-dispensateur (Toon, 1992). Cela peut avoir de grandes conséquences pour le patient, qui voit ainsi sa santé et ses revenus personnels passer des mains de son médecin traitant à celles de fonctionnaires. De soignant qu’il était, le médecin devient celui qui a le pouvoir de donner accès à des ressources supplémentaires à ses patients plus démunis. Il se retrouve dès lors dans une position particulièrement délicate, où il doit choisir entre maintenir l’état de santé d’un patient en augmentant ses revenus ou restreindre les dépenses publiques et participer à une allocation judicieuse des ressources gouvernementales limitées (Harding et al., 2002; Hiscock et al., 2005; Van De Vathorst et Alvarez-Dardet, 2000). La rareté des ressources se fait d’autant plus pressante dans un contexte où les compensations pour invalidité contribuent à générer davantage de dépenses au niveau sociétal (Tellnes, 1989). À cela s’ajoute le fait que le Code de déontologie des médecins indique que « le médecin a le devoir primordial, à l’occasion de l’exercice de ses fonctions médicales, de protéger la santé et le bien-être des individus qu’il dessert tant sur le plan individuel que collectif » (CMQ, 2001, p.1). Ce qui sous-entend la protection des groupes vulnérables, dont font partie les patients incapables d’occuper un emploi pour des raisons médicales.

Clarifier les rôles

Plusieurs suggestions ont été amenées par le corps médical afin d’améliorer la tâche de certification d’invalidité. Le retrait du rôle d’évaluateur aux médecins traitant et l’instauration de postes d’évaluateurs médicaux indépendants sont les plus souvent rapportées (Hussey et al., 2004; Toon, 1992; Zinn et Furutani, 1996). L’auto-certification par le patient et des cliniques médicales dédiées d’évaluation ont même été proposées (Hussey et al., 2004). Si la tâche devait être inchangée, le souhait d’avoir une meilleure formation et davantage de support a été exprimé. Par support, on entend autant celui d’autres professionnels de la santé, des ressources communautaires que d’un référent régional en matière d’évaluation (Hussey et al., 2004, Sawney, 2002). Les omnipraticiens souhaitent obtenir davantage de reconnaissance pour ce rôle qui leur incombe et demandent à ce que les patients et les employeurs soient mieux informés sur les différents enjeux liés à l’incapacité à l’emploi (Sawney, 2002).

Les connaissances en matière de certification médicale pour invalidité au travail demeurent insuffisantes. Le savoir et la compréhension des pratiques de certification sont limités. Pourtant, nous l’avons vu, plusieurs enjeux et questionnements sont soulevés par le simple geste d’émettre un certificat. Ces enjeux sont d’autant plus grands lorsque les patients font partie d’un groupe vulnérable et que le médecin traitant se retrouve à devoir choisir entre les intérêts de ses patients et ceux du gouvernement. Il apparaît primordial de clarifier ce rôle joué par le médecin, étant donné que l’attitude et les comportements adoptés par ce dernier peuvent avoir un impact majeur sur la santé de ses patients.

Références

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