Prendre sa place au Québec : pratiques alternatives de mobilisation auprès de familles immigrantes en HLM (2014)

Isabel Heck

À une ère de fortes coupures dans les services sociaux où la pression pour une plus grande efficacité des interventions s’accentue et où un défi important consiste à joindre des clientèles dites « vulnérables », un organisme communautaire réussit, contre vents et marées, à mobiliser des familles immigrantes vivant en situation d’isolement, en investissant dans le développement de liens de confiance et de relations humaines. L’organisme Participation et entraide familiale (PEF) a été fondé par une résidente d’origine africaine d’un grand complexe de logements sociaux à Montréal. Sa mission consiste à favoriser l’insertion des familles immigrantes dans leur milieu de vie. Il intervient dans un environnement où se côtoient des personnes provenant de 70 pays différents et travaille dans des domaines aussi diversifiés que l’éducation, le rapprochement interculturel et intergénérationnel, le développement de compétences et les saines habitudes de vie. Comment la PEF réussit-elle à faire participer une population aussi diversifiée et qui a la réputation d’être difficile à joindre?

À travers une étude ethnographique menée dans le cadre d’un stage postdoctoral à l’équipe PRAXCIT (Pratiques de participation citoyenne dans la recherche et l’action sur les inégalités sociales) du Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté (CREMIS), Isabel Heck a analysé la pratique de la PEF et en a dégagé quatre éléments qui composent la clef de son succès. 1) Un travail innovant de proximité qui s’est développé à partir d’une pratique informelle et qui est basé sur le savoir d’expérience de l’intervenante de milieu, 2) le développement de liens significatifs avec les résidents se rapprochant d’un rapport familial plutôt que professionnel, 3) une approche souple et globale qui s’ajuste aux besoins et capacités d’agir des résidents, 4) une relation d’aide réciproque attentive aux enjeux de la « face ». La présentation et l’analyse de ces quatre éléments sont suivies d’une courte discussion de la pertinence, des défis et de l’intérêt de cette approche pour mieux mobiliser des populations difficiles à joindre.

La recherche s’est réalisée dans un esprit de coconstruction des connaissances, en collaboration avec Pierre Langlois (organisateur communautaire au Centre de santé et des services sociaux Jeanne-Mance) et en partenariat avec la PEF.